Source : Chronique de Daniel Germain initialement publiée dans Le journal de Montréal : https://www.journaldemontreal.com/2020/01/18/un-remboursement-de-6000-pour-une-cotisation-reer-de-5000
Nous entrons dans cette phase excitante qui vous consolera peut-être des déboires du CH : c’est la saison des REER !
Pas convaincu ? Attendez voir… Vous pourriez vous faire rembourser en impôt plus que le montant de la contribution REER. Comment est-ce possible ? Explications.
Le vrai impôt
Rappelons d’abord qu’une cotisation REER est déduite du revenu imposable. Quant à notre système fiscal, il est progressif et fonctionne par paliers.
Pour tout le monde, les premières tranches de revenus ne sont pas ou sont peu imposées. Celles qui s’ajoutent par dessus sont frappées par des taux de plus en plus importants. Pour l’année 2019, le taux le plus élevé, 53,31 % (fédéral et provincial combinés), s’applique sur les revenus de plus de 210 370 $.
On appelle « taux marginal d’imposition » le taux qui touche les derniers dollars gagnés par un individu, soit la couche du dessus. Pour beaucoup de contribuables, il s’élève à 37,12 %, soit le taux d’imposition appliqué sur la tranche de revenu se situant entre 47 630 $ et 80 000 $.
L’autre impôt
Il n’y a pas que l’impôt qui est progressif, le soutien gouvernemental aux familles l’est aussi, particulièrement au Québec. Plus elle compte de jeunes enfants, plus une famille est susceptible de profiter des programmes dits « sociofiscaux » : allocation famille, aide canadienne pour enfant, crédit pour frais de garde, crédit pour solidarité, etc.
Comme cette aide est attribuée en fonction des revenus des ménages, il faut s’attendre à ce qu’elle fonde à mesure que les salaires des parents s’améliorent.
Donc, les hausses de revenu ne sont pas seulement accompagnées d’impôt supplémentaire à payer, mais aussi d’une diminution de l’aide financière accordée par l’État.
Les TEMI
Il y a un nom pour désigner la ponction totale (impôt et diminution de l’aide) sur les derniers dollars de revenu : les TEMI, pour « taux effectifs marginaux d’imposition ». Il existe des situations aberrantes où, pour chaque dollar gagné supplémentaire, un contribuable se retrouve en fin de compte avec un dollar de moins dans ses poches en raison des TEMI, ce qui revient à un taux d’imposition de 100 %.
Il y a de quoi s’arracher les cheveux, mais on ne doit pas voir là la manifestation de gouvernements excessivement gourmands, mais l’effet pervers d’un régime de redistribution généreux et progressif. Il y a deux moyens de diminuer l’effet des TEMI : réduire ou abolir les mesures de soutien ou les étendre aux ménages qui n’en ont pas besoin.
Le REER à la rescousse
C’est la raison pour laquelle les familles touchées par des TEMI élevés ont intérêt à contribuer au REER.
Je me suis demandé quel serait, pour elles, l’effet d’une cotisation de 5000 $ au REER Fondaction de la CSN (le Fonds de solidarité de la FTQ est fermé pour les contributions forfaitaires pour l’année 2019). En plus de la déduction fiscale habituelle, une contribution à ce fonds de travailleur donne droit à des crédits d’impôt de 35 %.
J’ai demandé à un expert de ressortir les cas où les remboursements d’impôt (TEMI) sont les plus importants. Dany Provost, directeur planification financière et optimisation fiscale au cabinet SFL, a réalisé les calculs. Les résultats laissent bouche bée.
Imaginons deux conjoints qui gagnent chacun 75 250 $, parents de trois enfants, dont deux qui fréquentent la garderie non subventionnée. Une contribution de 5000 $ de la part d’un conjoint au REER de Fondaction entraînerait un remboursement d’impôt de… 6000 $, notamment en raison du crédit pour frais de garde, des crédits de 35 % associés à ce fonds de travailleur et de la réduction d’impôt. Dans le cas (peu probable) d’une mère monoparentale avec un salaire de 150 000 $ et quatre enfants en garderie, elle récupérerait 8330 $ !
Autre exemple : une personne monoparentale dont le salaire s’élève à 53 000 $ et dont l’enfant fréquente la garderie non subventionnée récupérerait plus de 97 % de sa contribution. Au net, son investissement de 5000 $ lui coûterait moins de 150 $ !
Les scénarios où la cotisation REER est plus efficace concernent les parents d’enfants en garderie non subventionnée. Les remboursements tournent autour de 90 % à 110 % de la cotisation REER à Fondaction.
No-brainer, vous dites…
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