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Avez-vous trop cotisé à votre REER ?

Maintenant que la «période des REER» est terminée et que vous avez peut-être emprunté pour cotiser au vôtre, prenez quelques minutes pour penser à ce qui suit.

«Si j’ai trop cotisé à mon REER?» Quelle question!

En fait, ma question a deux niveaux.

Le premier, un niveau absolu, où la « cotisation à son REER » pourrait être pourrait être remplacée par « l’épargne pour la retraite ». En avez-vous assez mis de côté pour votre retraite? À ce sujet, je vous réfère au livre que j’ai écrit en 2006, Arrêtez de planifier votre retraite, planifiez votre plaisir, et qui est toujours d’actualité, même si les chiffres ne sont plus à jour. Vous constaterez qu’il est fréquent de ne pas en mettre assez mais qu’il est également possible d’en mettre trop. «C’est une question d’équilibre», comme on pourrait dire avec un accent pointu.

Le deuxième niveau, je l’avoue, a moins d’importance que le premier. En fait, les conséquences de se tromper sont généralement moins grandes. Je parle ici de la cotisation au REER, au détriment de la cotisation au CELI. Autrement dit, ce deuxième niveau pourrait prendre la forme de la question suivante : « Avez-vous trop cotisé à votre REER par rapport à votre CELI? ».

Il n’est pas facile de répondre à cette question. À part quelques cas, où la réponse est évidente, il faut, idéalement, faire des calculs poussés pour y répondre de façon optimale. Comme je le disais, ce point revêt généralement une moindre importance car, à la différence de carrément manquer d’argent à sa retraite si on ne cotise pas suffisamment dans l’absolu, le fait de ne pas avoir l’allocation optimale REER-CELI fait qu’on paiera (un peu) plus d’impôt qu’autrement, ce qui est moins dramatique.

Dans certains cas, comme je le disais, il est virtuellement impossible de « trop cotiser » à son REER par rapport à son CELI. Pour ce faire, on doit connaître les raisons qui font qu’une option est supérieure à l’autre. Parmi ces raisons, la plus importante est bien connue des conseillers financiers. Il s’agit du taux d’imposition aujourd’hui et du taux d’imposition à la retraite.

Résumée simplement, elle peut s’énoncer de la façon suivante :

« Si tu sauves plus d’impôt aujourd’hui avec ta cotisation au REER que l’impôt que tu vas payer à ta retraite, cotise au REER avant de cotiser au CELI. Sinon, fais le contraire. »

Cet énoncé, particulièrement écrit de cette façon, contient quelques lacunes dont un manque de rigueur. L’impôt « sauvé » est en fait un taux marginal d’imposition, incluant tous les impacts sociofiscaux (dont les prestations pour enfants). On appelle ces taux marginaux les TEMI, pour taux effectifs marginaux d’imposition. Autrement dit: «la vraie vie».

Un autre défi de cet énoncé est que ce fameux taux d’impôt varie selon le revenu. Quand on cotise au REER, ce revenu change, le taux aussi. C’est bien beau avoir un «retour d’impôt» de 80 % parce qu’on est un parent monoparental mais ce pourcentage ne tiendra vraisemblablement pas la route pour chacun des dollars d’une grosse cotisation.

Autre lacune, l’effet du temps. Une cotisation à un moment donné sera retirée à un autre moment donné. Lequel?

Est-ce que les 5 000 $ de REER aujourd’hui seront les premiers dollars retirés à la retraite ou les derniers? Évidemment, tous ces dollars sont en quelque sorte «fondus» ensemble. On devrait donc travailler sur des taux moyens. Mais encore…

Ces taux moyens changent selon les revenus aussi à la retraite… Alors vous saisissez la complexité?

J’ai déjà écrit sur le sujet en mentionnant que, à cause de ces nombreux défis, ce n’est pas demain la veille qu’on aura accès à des résultats optimaux. En fait, je me trompais. Il est maintenant possible, avec des outils d’intelligence artificielle, d’optimiser grandement ces cotisations REER-CELI dans un contexte de projections. Évidemment, les résultats qui sortent de telles machines doivent être interprétés de façon judicieuse.

Il ne s’agit pas d’une boule de cristal. Les résultats sont fonctions d’hypothèses et, comme dans n’importe quel programme informatique, garbage in, garbage out, comme on dit. Même dans le cas où les hypothèses sont loin d’être des «déchets», rien n’est certain. Tout est une question de probabilités, de maximisation des «chances» d’améliorer son sort.

Donc, revenons à ces cas où la direction à prendre (REER ou CELI) est relativement évidente. Pour que ce soit évident, il faut que le taux d’impôt d’aujourd’hui soit nettement différent du taux à la retraite. Quelles sont les circonstances qui mènent à de grands écarts?

  1. Les personnes qui, une fois à la retraite, auront droit au Supplément de revenu garanti (SRG), cette prestation non imposable du fédéral qui est généralement réduite à compter du premier dollar de revenu imposable. Comme les retraits d’un REER (ou d’un FERR) sont imposables, elles nuisent à cette prestation. Elles nuisent souvent à la hauteur de plus de 50%… Si des personnes sont dans cette situation (SRG à la retraite), c’est généralement qu’elles ont des revenus relativement faibles aujourd’hui aussi, payant nettement moins que 50 % à la marge. Si tel est le cas, vaut mieux cotiser dans le CELI au lieu du REER. SI le CELI est « plein », de l’épargne ordinaire (hors du REER) pourra faire l’affaire.

  2. Les personnes ayant un TEMI actuel élevé, notamment à cause des prestations pour enfants ou des crédits pour frais de garde. Les raisons sont nombreuses. Il s’agit de l’impact que génèrent les différents crédits d’impôts (remboursables et non remboursables) en plus des taux d’imposition des différents paliers. Par exemple, la tranche de revenu de 30 000$ à 50 000$ pour une famille monoparentale a des TEMI qui peuvent donner le vertige. Dans certains cas, lorsqu’on additionne les crédits de fonds de travailleurs à ces TEMI de base, on dépasse 100 %! Ça veut dire qu’on peut avoir un remboursement d’impôt plus élevé que le coût de la cotisation elle-même. J’ai déjà vu un cas où une mère monoparentale recevait plus de 6 000$ pour avoir cotisé 5 000$ à son REER dans Fondaction, le fonds de travailleurs de la CSN! Cette personne a tout avantage à emprunter si elle n’a pas les moyens d’investir car elle récupérera plus que sa cotisation totale en impacts fiscaux et autres.

Cela dit, quand on n’a pas accès à ces outils d’intelligence artificielle et qu’on n’est pas dans une situation facile à trancher, il faut savoir qu’on a probablement besoin des deux véhicules pour optimiser sa situation.

Encore une fois, le vieux dicton de «ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier» prend tout son sens.

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