Je donnais une formation cette semaine sur le sujet du RRQ et il m’est venu à l’idée, lorsque je parlais du financement de ce régime, de parler de situations où une personne (ou son employeur) cotise au régime pour absolument rien. Eh oui, ça existe. En fait, c’est l’ensemble du régime qui en profite. Les autres, quoi…
Ce n’est pas tant pour décrier ce fait que pour sensibiliser les personnes à ces situations que j’écris là-dessus. Si vous êtes dans l’une de ces situations, un jour, au moins vous le saurez et vous aurez peut-être des décisions à prendre en conséquence.
Situation #1 : Vous avez déjà acquis la rente maximale
Cette situation vise les personnes d’un certain âge (au moins 54 ans… ouch! Je me sens visé).
L’âge de 54 ans est un âge extrême pour des cas réguliers. La rente maximale d’une personne de cet âge peut être acquise si elle compte demander sa rente dès l’âge de 60 ans. Pour ce faire, cette personne doit avoir gagné, dès l’âge de 18 ans, au moins le maximum des gains admissibles (MGA). Ce montant est de 57 400 $ en 2019 et il est indexé chaque année. On comprend que ça touche peu de monde.
Sans entrer dans le détail (pour certains détails de calculs, voir mon billet de 2016 Le RRQ fait bande à part ), disons qu’on a environ de six à sept années de grâce dans le calcul de la rente de retraite. Autrement dit, on peut n’avoir gagné aucun revenu pendant six ou sept ans et recevoir tout de même la rente maximale. Avec une rente prise à 60 ans, c’est précisément 6,3 années. Avec une rente prise à 65 ans, c’est plutôt 7 ans et avec une rente qui débute à 70 ans, c’est 7,8 ans.
Donc, si une personne de 54 ans compte prendre sa rente de retraite à 60 ans et qu’elle a eu la chance de toujours gagner au moins le MGA, les six autres années de cotisation ne serviront à rien, car elles auraient pu être à 0 et être retranchées du calcul.
Mais attention…
Il n’y a que 4 % des individus qui touchent la rente de retraite maximale, au moment d’en faire la demande. Alors, imaginez combien, parmi celles-ci, n’ont pas cotisé pendant 6 ou 7 ans à la fin de leur carrière. À 54 ans (ou 58 ans pour une rente débutant à 65 ans), la possibilité de contribuer pour rien au régime est donc plutôt théorique.
Par contre, il arrive de voir des personnes ayant des revenus supérieurs au MGA à compter de l’âge, par exemple, de 22 ans.
Si tel est cas, disons qu’aucun revenu n’a été gagné de 18 à 21 ans, on a donc quatre années (18, 19, 20 et 21) qui seront éventuellement retranchées du calcul de la rente. Pour une rente demandée à 65 ans, comme on a sept années possibles sans revenu pour profiter de la rente maximale, on peut donc arrêter de cotiser trois autres années avant l’âge de 65 ans, soit à 62 ans, sans être pénalisé.
Si un individu a gagné certains revenus (moins que le MGA) pendant quelques années après l’âge de 21 ans dans notre exemple, les cotisations de 62 à 64 ans seraient moins « perdues » car elles augmenteraient plus ou moins la rente de retraite. Des calculs personnalisés sont nécessaires.
Si vous êtes un propriétaire d’entreprise, cet élément est primordial dans la décision salaire/dividende.
Si vous avez été invalide ou avez reçu, à votre nom, des prestations pour enfants de moins de sept ans, des nuances être doivent apportées.
Situation #2 : Vous avez plus de 70 ans
Depuis 1998, les personnes de plus de 70 ans qui ont un revenu de travail, soit un revenu d’emploi ou de travail autonome, doivent cotiser comme si elles avaient moins de 70 ans. Même si la « période cotisable » définie dans la loi s’arrête à 70 ans, les cotisations ne s’arrêtent plus à cet âge.
Que recevez-vous en retour de ces cotisations ?
Nada… si vous jamais vous n’avez pas demandé votre rente de retraite. Si vous la recevez déjà (ce qui devrait être le cas à moins de négligence), elle sera bonifiée de 0,5% par année du montant excédant le revenu admissible sur 3 500 $.
Situation #3 : Vous avez deux employeurs (ou plus)
Dans cette situation, ce n’est pas vous directement qui cotisez dans le vide, mais vos employeurs. Si vous êtes un actionnaire de ces deux entreprises qui vous versent les salaires, alors on peut dire que c’est un peu vous qui payez en trop.
La situation est simple. Chaque employeur effectue des retenues à la source pour chacun de vos emplois. Il faut d’abord savoir que les cotisations de l’employé (5,55%) et celles de l’employeur (5,55%) s’appliquent sur le revenu excédant l’exemption générale de 3 500$. Si un employé gagne, par exemple, 50 000$, la cotisation de l’employé sera de 5,55 % de 46 500$ (50 000 moins 3 500).
Si vous gagnez, au total du revenu des deux emplois, moins que le MGA, il n’y a aucune cotisation perdue. Vos employeurs sauvent chacun les cotisations sur l’exemption générale (3 500$) alors qu’un seul employeur n’aurait bénéficié que d’une seule exemption si vous n’aviez eu qu’une seule source de revenus. De votre côté, vous bénéficiez également de deux fois l’exemption générale. Vous devrez donc combler ce manque, de 192,50 $ en 2019, sur votre déclaration de revenus.
Par contre, si vos revenus des deux emplois dépassent de 3500 $ le MGA, des cotisations de l’employeur seront carrément perdues.
Par exemple, si votre revenu est de 40 000 $ pour un emploi et de 30 000 $ pour un autre emploi. Les cotisations de l’employeur seront calculées comme suit :
Emploi 1: 5,55 % X (40 000 – 3 500) = 2 025,75$
Emploi 2: 5,55 % X (30 000 – 3 500) = 1 457,50$
Le total donne donc 3 483,25$. Si vous n’aviez eu qu’un seul employeur, la cotisation de ce dernier n’aurait pas excédé 5,55 % de 53 900$ (MGA de 57 400 – 3 500), soit 2 964,50$. Un « cadeau » de 518,75$ est ainsi fait au régime par vos employeurs. Les deux au total, aucun en particulier – à moins que ça vous fasse plaisir de l’attribuer à l’un d’eux, mais ça reste dans votre tête.
Pour les cotisations d’un employé, dans cette situation, il faut comprendre qu’elles seront payées en trop pendant l’année, mais elles feront l’objet d’une correction sur la déclaration de revenus, pour rendre le tout identique à une situation où on n’a qu’un seul employeur. Il existe des lignes pour ces cotisations payées en trop.
Voilà. Même si ces situations ne sont pas fréquentes, vous les connaissez maintenant.
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